L’AFFAIRE de Rennes-le-Château

Christian Doumergue

prix // 30 €


Seconde édition en un seul volume (version intégrale) - Après une première édition en deux volumes et en coffret luxe L’Affaire de Rennes-le-Château de Christian Doumergue se voit honoré d’une nouvelle édition grand public en un seul volume. Cette nouvelle édition reprend l’intégralité du texte original ainsi que l’ensemble de ses nombreuses illustrations. Cet ouvrage de Christian Doumergue est l’aboutissement de plus dix ans de recherches en bibliothèques et sur le terrain. Riche de nombreux documents inédits, issus d’archives privées ou publiques, il propose un éclairage nouveau sur l’Affaire de Rennes... -

 

Sommaire / Tome premier - Liminaire - Introduction – Chapitres I à IV - Tome second - Chapitres I à III - Conclusion - Annexe 1 - Entretien avec Franck Daffos - Annexe 2 - Le Serpent Rouge.

 

Assurément un livre événement... C’est que l’auteur, à travers un texte illustré par plus de quatre-vingt documents, pour la plupart inédits, apporte de nombreuses pièces nouvelles au dossier. Issues du fonds Corbu-Captier, des correspondances jamais encore publiées à ce jour, jamais montrées même pour certaines, révèlent des aspects méconnus de la vie de l’abbé Saunière. On le découvre, par exemple, disciple de Sébastian Kneipp, prêtre allemand très en vogue dans les dernières années du XIXe siècle. Le prêtre n’est pas seul à voir son portrait considérablement précisé. D’autres documents éclairent - eux - le Mystère de Rennes. Plus exactement, nous disent que derrière le mythe créé par Pierre Plantard autour de l’abbé Saunière il y a bien quelque chose. Ainsi voit-on Jules Doinel, le fondateur de l’Église Gnostique, dont le présent ouvrage expose en détail l’implication dans ce que Christian Doumergue appelle fort justement "L’Affaire de Rennes-le-Château", côtoyer l’un des acteurs-clef du Mystère, Monseigneur Billard lui-même... Éclairage exceptionnel que l’on ne pourra comprendre qu’au regard d’autres découvertes tout aussi étonnantes ; recherches menées par les inquisiteurs près de Limoux pour y retrouver le "Trésor" des Cathares, tentative d’exploration par un Déodat Roché alors proche de Doinel, d’un ancien temple souterrain près d’Alet… Ainsi au fil de ces lignes résultant de près de dix ans de recherches ressuscite peu à peu un passé oublié… et jusqu’à ce jour insoupçonné ! - En annexe : le SERPENT ROUGE avec une présentation de Christian Doumergue - Ainsi que deux entretiens exclusifs avec Paul Saussez et Franck Daffos.

 

ILS ONT DIT À PROPOS DU LIVRE 

 

« C’est toujours avec le plus grand plaisir que nous suivons les pérégrinations de Christian Doumergue sur les sentiers parfois escarpés de l’énigme de Rennes-le-Château. À chaque fois, il nous étonne par la pertinence de ses sources et le travail de documentaliste qui le caractérise. On ne peut donc que saluer les éditions Arqa qui ont fort justement décidé de publier son Affaire de Rennes-le-Château parue en 2006, en une seconde édition, en un seul volume. »

Franck Daffos

 

« Christian Doumergue confirme tout le bien que l’on pensait de lui dans son dernier ouvrage. Il replace les événements et les faits dans leur contexte, il décortique, il analyse, il ouvre de nouvelles pistes, son livre est un travail essentiel sur l’affaire de Rennes-le-Château. Il bourre dans sa pipe tout le mauvais tabac dont est faite cette histoire, et quand on le fume c’est un havane. »

Daniel Dugès

 

« Le livre de Christian Doumergue dénoue l’écheveau complexe de « l’Affaire » et conclut à l’existence du tombeau de Jésus et d’un dépôt trésoraire originel. Un ouvrage indispensable. »

Jean-Pierre Deloux

 

« Au travers de cet ouvrage, Christian Doumergue nous emmène vers des rivages inattendus qui ne peuvent que réveiller notre curiosité longtemps endormie. Une étude qui nous conduit de Rennes-Le-Château à l’Église de Doinel et qui nous présente Marie Dénarnaud sous un jour que personne n’avait encore envisagé ! Un livre passionnant pour les passionnés de l’affaire de Rennes-Le-Château ! »

Jean-Patrick Pourtal


420 pages


ISBN 2755100281


Voir aussi //

Article

 

EXTRAIT // Les Chroniques de MARS, numéro 8



(extrait)


« Alors ?... Un livre de plus sur Rennes-le-Château ? », me direz-vous… Oui ! Mais quel livre ! Une mise au point. En quelque sorte. Un livre venu à point nommé pour faire un tour d’horizon, comme un rappel dans l’Ether, au point sublime de nos doutes. Un livre de certitudes éclairant assurément la part d’ombre de nos consciences embrumées par tant d’élucubrations ahanées à l’envi, recopiées à l’infini, en anglais aussi… Mais un point, c’est tout. Alors, luisant dans les ténèbres, quelques feux à demi éteints, puis rallumés par Christian Doumergue, soufflant sur des braises qui ne demandaient qu’à s’enflammer, ce livre solaire composé de main de maître, en terre occitane, a pour mérite certain de remettre en perspective bien des croyances ancrées, bien des réalités que l’on eût pensées acquises. Pourtant à la lueur de ces flammes révélées, par l’auteur interposé (1), ce mystère qui n’en finit plus de faire parler de lui - halo éternel et sacré qui touche à l’origine de la chrétienté - nous incite à revisiter « L’Affaire de Rennes-le-Château » dans sa globalité. De l’Histoire aux Mythes certes, mais aussi du mythe colporté à l’histoire revisitée, qu’en est-il au juste de ce prêtre taciturne, arrivé frais émoulu de son diocèse de Carcassonne, un certain premier juin de l’an 1885 et que la légende, chemin faisant, transmutera en or, en… « curé aux milliards » ? C’est ce que Christian Doumergue nous apporte ici, telle une mosaïque antique sur l’étal du jugement de Dieu, comme s’il eût fallu pareil écot pour que nous fussions enfin, au faîte du secret. L’introduction au mystère de Rennes-le-Château passe par une bonne connaissance des évènements, tels qu’ils se déroulèrent historiquement à l’époque de l’abbé Saunière. Or rares furent les auteurs, faute d’éléments sans doute, ou pressés d’en finir, qui donnèrent tout simplement à cette « Affaire » la dimension première dévolue à toute histoire, un premier degré imposé, un passage obligé, pertinent, sincère, émouvant aussi, permettant le cas échéant seulement d’accéder in fine à une infra-histoire à l’origine du secret. Tel n’est pas le propos aujourd’hui (…). »

 

« Les précédentes parties de notre ouvrage ont montré de quelle manière l’histoire de l’abbé Saunière, tombée dans un profond oubli au sortir des deux guerres qui ébranlèrent l’Europe, est progressivement sortie de l’ombre à partir des années 1950. On a alors assisté à la création d’un véritable mythe sur les bases d’un substrat qui s’y prêtait et cela pour différentes raisons. Tout d’abord, l’histoire de l’abbé Saunière, bien que n’étant pas en soi un cas isolé, était assez extraordinaire pour donner lieu à toutes les suppositions possibles. Ensuite, la documentation concernant le prêtre était suffisamment fragmentaire et lacunaire pour autoriser, là encore, maintes extrapolations. S’il nous reste en effet ce qu’il faut d’archives pour dresser du prêtre une vie aussi précise que celle dont nous avons rendu compte dans la première partie du présent ouvrage, il ne faut pas omettre que les archives dont nous disposons actuellement (…). »

 

 

________________________

 

 

D’étranges messages…

 

 

Une structure initiatique.

 

La rapide histoire de la création du «mythe» de Rennes-le-Château telle que nous venons de la formuler, montre à quel point, l’empreinte de Pierre Plantard de Saint-Clair et de Philippe de Chérisey, est déterminante dans la façon dont, à partir des années 1960, l’histoire de l’abbé Saunière a peu à peu été réécrite. Surtout, elle met en valeur un fait. C’est que loin d’être gratuite, ou mégalomaniaque, comme on le dit systématiquement, cette reconstruction, qui est organisée, suit une logique indéfectible et adopte un mode de fonctionnement bien défini. Du milieu des années 1960 au début des années 1980, les «publications» successives de Pierre Plantard suivent un schéma que l’on pourrait qualifier d’initiatique. Chaque ouvrage postérieur développe ce qui était à peine suggéré dans l’ouvrage antérieur, et ne pouvait être lu, et compris, qu’à la lecture de la nouvelle publication. Ainsi, pour reprendre le dernier exemple donné, le fait que Jésus ait pu être à l’origine de la dynastie mérovingienne, est bien implicitement présent dans La Race fabuleuse, mais insoupçonnable ― ou presque ― si l’on ne connaît les conclusions qui sont celles de L’Enigme Sacrée. Et l’on trouve déjà cette idée, mais très discrètement exprimée, à travers une note de bas de page sur la Salette dans L’Or de Rennes.

 

Ce principe est le principe régisseur de l’ensemble des «productions» du Prieuré de Sion, lorsqu’on les analyse l’une par rapport à l’autre, selon la chronologie de parution. L’ensemble est conçu comme un tableau, auquel chaque nouvelle touche vient apporter un nouvel éclairage. C’est très probablement pour cette raison que Gérard de Sède a placé en exergue de La Race fabuleuse cette citation de Claude Lewis Strauss : «Chaque histoire s’accompagne d’un nombre indéterminé d’anti-histoire dont chacune est complémentaire des autres.»

 

De fait, si La Race fabuleuse n’a, au premier abord, aucun lien formel avec l’Affaire de Rennes-le-Château, il s’agit en réalité d’un élément clé dans la série de «révélations» entamées par Pierre Plantard. Non seulement, La Race Fabuleuse développe la trame dynastique placée au centre du mystère Saunière par Plantard, mais surtout, elle apporte à l’énigme de Rennes ― jamais nommée ― une nouvelle pierre, déjà évoquée précédemment, mais non mise en exposition, Les Bergers d’Arcadie de Nicolas Poussin, et une pierre entièrement neuve : celle du Tombeau d’Arque.

 

 

 

La façon dont le «Prieuré de Sion» va immiscer la toile de Nicolas Poussin dans l’Affaire de Rennes est un exemple particulièrement prégnant de sa conception d’une révélation progressive de son «savoir».

 

La première mention en est faite, on l’a vu, dans le texte signé Madeleine Blancasall, lorsqu’il est précisé que Saunière avait acquis, lors de son séjour à Paris, une réplique d’une toile de Poussin. Le nom de cette toile ― Les Bergers d’Arcadie ― sera donné deux ans plus tard d’abord dans un nouvel apocryphe déposé à la Bibliothèque Nationale le 27 avril 1967, Les dossiers secrets d’Henri Lobineau, puis par Gérard de Sède dans L’Or de Rennes. L’opuscule signale que Nicolas Poussin avait connaissance d’un secret qu’il a codé dans deux de ses tableaux : Les Bergers d’Arcadie et Le Roi Midas. L’Or de Rennes est beaucoup plus silencieux. Pourquoi Saunière a-t-il acquis cette toile ? Quel est son rôle et sa place dans l’Affaire ? De Sède n’évoque aucune de ces questions. Ce n’est en effet que dans La Race fabuleuse que les interrogations que pose l’achat d’une copie du tableau seront pour la première fois développées au cours d’un chapitre intitulé «Le secret de Poussin».

 

L’auteur présente la toile comme une de ces œuvres d’où émane une impression de mystère «dans la mesure où leur signification nous échappe.» Cette impression est mise en rapport avec une lettre de Louis Fouquet à son frère Nicolas à propos de son entretien avec Nicolas Poussin. La missive est citée dans son intégralité, et un passage en est plus particulièrement souligné : «Luy et moi nous avons projeté certaines choses dont je pourrai vous entretenir à fond dans peu, qui vous donneront par monsieur Poussin des avantages que les roys auraient grand peine à tirer de lui, et qu’après lui peut-être personne au monde ne recouvrera jamais dans les siècles advenir ; et, ce qui plus est, cela serait sans beaucoup de dépenses et pourrait même tourner à profit, et ce sont choses si fort à rechercher que quoi que ce soit sur la Terre maintenant ne peut avoir une meilleure fortune ni peut être égale.» (1) 

 

Afin que le secret ne disparaisse pas avec lui, Nicolas Poussin l’aurait dissimulé dans un de ses tableaux, Les Bergers d’Arcadie, dont De Sède suggère qu’il renvoie à un paysage réel. «Il n’est guère facile de découvrir où cette scène se situe ni à quoi elle se rapporte. Pourtant, l’un des biographes du peintre souligne : “le soin minutieux qu’a Poussin de reprendre des paysages réels dans ses tableaux.”» (2)

 

La clef de cette allusion est donnée dans les deux derniers paragraphes du «Secret de Poussin» : «Aujourd’hui, Les Bergers d’Arcadie sont à Paris, au musée du Louvre, mais le public ne peut les voir : ils sont à l’abri dans une réserve.

 

» Si pourtant l’envie vous tenaille de contempler l’immortel chef d’œuvre de Poussin, quittez Paris et dirigez-vous vers la haute vallée de l’Aude, jusqu’à Alet. A quelques kilomètres de là, engagez-vous sur la R. N. 613, jusqu’au point précis où cette route coupe le méridien de Paris. Vous êtes à la côte d’altitude 297, sur un petit pont, sur le territoire de la commune d’Arques. De là part, à droite, un petit sentier long à peine d’une vingtaine de mètres. Prenez-le car au bout, voici, entourée de ses arbustes, la tombe des Bergers d’Arcadie.» (3)

 

Gérard de Sède se contente alors de souligner que si la tombe d’Arque est strictement identique à celle du tableau de Poussin, la même similitude rapproche le paysage que l’on observe depuis la sépulture, et celui dépeint par Poussin dans le fond de sa toile.

 

En 1974, de Sède devait à nouveau évoquer le tombeau d’Arques. En annexe de son ouvrage Le Secret des Cathares, il dresse en effet un «itinéraire cathare», où Arques est mentionné, et pour son donjon, pris en 1210 par les troupes de Simon de Montfort, et pour la présence de Déodat Roché, dont la contribution à la résurgence du catharisme et à son étude au XXe siècle a été considérable, et qui, à ce moment là, vit encore dans le petit village audois. Après avoir souligné ces deux éléments, l’auteur ajoute cette remarque destinée à parfaire son tableau d’Arques : «Aux environs, menhir (Pierre Levée du Puntil [sic]) et curieuse tombe (commune de Peyrolles).» (4)  

 

Il faudra attendre 1977, avec Signé Rose + Croix ― une réédition largement augmentée de L’Or de Rennes, pour que de Sède non seulement en dise plus, mais relie le tableau de Poussin et le tombeau d’Arques à l’Affaire de Rennes-le-Château.

 

En effet, à aucun moment dans La Race Fabuleuse, y compris lorsqu’il évoque Arques, de Séde ne mentionne ni le nom, ni l’affaire, de Rennes. L’étude de son texte montre qu’au contraire, tout au long de La Race Fabuleuse, il prend un soin extrême à en taire le nom. Ainsi, alors que dans L’Or de Rennes il désignait les généalogies d’Henri Lobineau sous le titre : Généalogies des rois mérovingiens et origines des diverses familles françaises et étrangères de souche mérovingienne d’après l’abbé Pichon, le docteur Hervé et les parchemins de l’abbé Saunière, de Rennes-le-Château (5), il donne, dans La Race fabuleuse pour titre au même ouvrage : Généalogie des rois mérovingiens, par Henri Lobineau. (6)

 

L’impression qui ressort de ce silence, c’est que Gérard de Sède, et surtout ses «inspirateurs», n’ont pas voulu établir tout de suite ― aux yeux de tous ― la connexion entre Les Bergers d’Arcadie et l’Affaire Saunière. Ce qui ne fait que confirmer la logique initiatique ordonnant les publications du Prieuré. En effet, il est indubitable que ce n’est pas faute d’éléments informationnels que de Sède n’évoque pas le lien entre le tableau de Poussin et Rennes-le-Château, mais bien mû par une volonté de silence. De fait, en 1977, Signé Rose + Croix n’apportera pour ainsi dire aucune information nouvelle à propos des Bergers. L’ouvrage se contentera de confirmer, par une courte analyse de la toile, que c’est bien le paysage visible depuis le tombeau d’Arque qu’elle dépeint. La femme présente à droite du tableau, désigne du doigt le cou de l’un des bergers, une façon d’évoquer un des reliefs visibles depuis le tombeau et peint dans l’arrière fond du tableau : le Col d’al Pastre (Col du Berger). Cette analyse sera inlassablement reprise par la suite. Elle ne doit pas occulter que la fonction principale de ces nouvelles digressions autour des Bergers est d’établir cette fois formellement un lien entre le lieu, la toile, et l’abbé Saunière. «En partant à la découverte de ce monument qui fut érigé à la fin du XIXe siècle, il est bon de se munir, comme l’avait fait Bérenger Saunière, d’une bonne reproduction du célèbre tableau de Poussin que l’on voit au Louvre : Les Bergers d’Arcadie.» (7)  

 

L’étude comparée des publications du «Prieuré de Sion», met donc en évidence une façon de procéder bien rodée. Systématiquement, est mis en avant un élément, dont on se rend compte, au vu des publications suivantes, qu’il n’a d’autre fonction que de détourner l’attention des allusions et sous entendus appelés à prendre par la suite la première place. Dans L’Or de Rennes c’est l’idée du trésor matériel qui prédomine. Le secret dynastique et religieux est à l’arrière plan. Dans La race Fabuleuse le secret dynastique passe au premier plan, et se mêle à la question de l’origine extraordinaire de la lignée mérovingienne. L’origine christique est sous-entendue, mais l’attention du lecteur est détournée vers une autre lecture, qui n’a d’autre rôle que de faire écran, l’origine extraterrestre. Enfin, l’Enigme Sacrée passe au premier plan ce qui était jusqu’à présent à l’arrière plan : la dynastie royale issue de Jésus et Marie-Madeleine. Le tout est cohérent, structuré, et l’exemple des Bergers d’Arcadie montre que le «Prieuré de Sion» tait délibérément certaines informations qui ne seront livrées que plus tard, non par ignorance, mais selon un schéma délibéré. Une telle structure montre, de manière certaine, que Pierre Plantard et ceux qui l’entouraient, possédaient bien plus qu’ils ne l’ont dit. Ce qui soulève une nouvelle interrogation : ont-ils tout dit ?

 

 

Le Serpent Rouge.

 

 

Répondre à cette question revient à déterminer si dans les «publications» du Prieuré  existent des éléments non exploités en tant que théorie centrale dans les ouvrages destinés au grand public.

 

 Placé sous la signature de Pierre Feugère, Louis Saint-Maxent et Gaston de Koker, Le Serpent Rouge, note sur Saint Germain des Près et Saint Sulpice, un des textes déposés à la Bibliothèque Nationale de France, le 17 janvier 1967, est ici d’une importance essentielle.

 

Encore une fois, c’est Pierre Plantard qu’il faut voir derrière la composition ― ou plus exactement la mise en page ― de ce texte qui se compose d’une série de «devises» chacune placée sous l’autorité d’un des treize signes du zodiaque, suivies de quelques planches sur Saint Germain et Saint Sulpice, d’un tableau dynastique et de deux cartes de la Gaule au VIe et au VIIe siècle.

 

Les «devises» retranscrivent le parcours du narrateur vers la sépulture d’une femme se situant aux environs immédiats de Rennes-les-Bains, auxquels le texte multiplie les allusions. (8) C’est vers elle que le narrateur se dirige, sa quête n’a pas d’autre motif : «Dans mon pèlerinage éprouvant, je tentais de me frayer à l’épée une voie à travers la végétation inextricable des bois, je voulais parvenir à la demeure de la BELLE endormie en qui certains poètes voient la REINE d’un royaume disparu.» (troisième signe).

 

 

 

 

 

Aux quatrième et cinquième signes, l’auteur fait de nouveau allusion à cette mystérieuse morte, mais sans que ces nouvelles indications ne permettent d’en deviner le nom. Ce n’est qu’au septième signe, que l’identité de la défunte est posée sans ambiguïté : «De celle que je désirais libérer, montaient vers moi les effluves du parfum qui imprégnèrent le sépulcre. Jadis les uns l’avaient nommée : ISIS, reine des sources bienfaisantes, VENEZ A MOI VOUS TOUS QUI SOUFFREZ ET JE VOUS SOULAGERAI, d’autres : MADELEINE, au célèbre vase plein d’un baume guérisseur.»

 

La morte dont le narrateur cherche à découvrir la sépulture à proximité de Rennes-les-Bains est donc sainte Marie-Madeleine, la Marie de Magdala des évangiles. Si le septième signe est à ce sujet très explicite, les allusions sibyllines des autres, vont dans ce sens.

 

Ainsi, au cinquième signe, la morte était-elle appelée «REINE du Castel», expression qui renvoie incontestablement, là encore, à Marie de Magdala. D’après les hagiographies médiévales celle-ci est en effet une princesse de sang royal. Voilà qui justifie son titre de Reine. En outre, St Jérôme, donne pour origine au mot «Magdala» le mot hébreux לּרגמ (migdal) qui signifie «tour». Il prête à ce terme «tour» un sens symbolique, renvoyant à la Tour de David, et symbolisant par là la foi de la sainte, mais Odon, à sa suite, y verra un sens historique. Tour étant au moyen-âge synonyme de château, Odon en conclut que Madeleine possédait un château et donc, selon le modèle féodal, était issue de la haute noblesse. (9) C’est cette lecture là qui allait prédominer durant le moyen-âge et l’époque moderne. Ainsi, dans de nombreuses hagiographies de Marie-Madeleine, est-il précisé qu’elle fut surnommée Magdeleine par rapport au château de Magdalon (10), dont elle avait hérité et qu’elle habitait. (11)

La lecture de la page de couverture du Serpent Rouge apporte une autre confirmation à cette interprétation du texte. En effet, y figure, surmontant un blason occupant le centre de la page, la devise latine : «Eous Scaphæ» dont la traduction est : «Barque d’Orient». L’allusion à Marie-Madeleine est tout aussi prégnante que précédemment. Selon le légendaire de la sainte ― qui sera analysé en détail dans la suite de notre propos ― partie de Jérusalem, elle arriva en effet dans une embarcation sans voile ni rame, une barque venue d’Orient, à Marseille.   

 

L’histoire qui se dessine dans Le Serpent Rouge est donc tout autre que celle, lancée sur la place publique, par Pierre Plantard. Selon ce texte, le grand secret de Rennes-le-Château est la présence, à proximité de Rennes-les-Bains, de la tombe de Marie-Madeleine.

 

L’auteur du Serpent Rouge affirme avoir pénétré dans ce sanctuaire. Au onzième signe, il dit en effet à propos de Marie-Madeleine : «…de cette REINE j’ai visité les demeures cachées.»

 

Cette affirmation vient compléter la rapide description des lieux faite au dixième signe : «Mais combien ont saccagé la MAISON, ne laissant que des cadavres embaumés et de nombreux métaux qu’ils n’avaient pu emporter.»

 

La description, bien que rapide, est suffisamment précise pour nous donner un aperçu très clair des lieux. Le sanctuaire évoqué, contrairement à ce que l’on aurait pu penser jusqu’alors, ne comporte pas que l’unique sépulture de Marie-Madeleine, mais abrite également d’autres tombes, enfermant des corps eux aussi embaumés. Ensuite, il est à côté de ces tombes un dépôt trésoraire dans lequel plus d’un est venu puiser.

 

Dans Le Serpent Rouge, il n’est rien dit de l’identité de ces autres morts dont les corps reposent à côté de Marie-Madeleine. Pour résoudre cette question, il faut rapprocher la description que Le Serpent Rouge dresse du sanctuaire d’un texte qui devait paraître en 1985, dans une revue intitulée : Le Trésor de Sion, dont il semble que la publication se situe dans la mouvance du Prieuré de Sion…

 

On y retrouve, en effet, exactement la même description des lieux que dans Le Serpent Rouge.

 

Dés le numéro 0, dans un article intitulé «Le Rocher de Sion», il est question de la double nature du trésor de Rennes, «à la fois matériel et spirituel». Paru au mois de mai 1985, le numéro 1, par le biais d’un article d’un certain N. Morani, intitulé «Marie de Magdala à Rennes-le-Château», apporte de nouveaux éléments.

 

L’article s’ouvre sur un rapide résumé de l’Affaire de Rennes-le-Château. A l’occasion de ce très bref récit, l’auteur rapporte que «L’abbé Boudet avait révélé à l’abbé Saunière la cachette d’un trésor matériel, dans lequel il était permis de puiser à la condition de ne jamais parler de ce que l’on trouvait en même temps.»    

 

Le sens de cette dernière allusion, est révélé un peu plus tard dans l’article, à l’occasion de l’évocation de la mort de l’abbé Saunière. Reprenant la description donnée dans Les descendants mérovingiens…, l’auteur signale à ce moment que «Le cadavre fut assis dans un fauteuil, revêtu d’une ample robe rouge à glands, et exposé pendant tout un jour. Les visiteurs “initiés” coupèrent un gland, comme pour garder un souvenir…»

 

Dans Les descendants mérovingiens…, l’auteur signalait à propos de ce rituel, ne pas savoir pourquoi il avait eu lieu. Ce n’est plus le cas dans «Marie Magdala à Rennes-le-Château». N. Morani, le rapproche en effet de croyances mérovingiennes. Surtout, il note : «Certains pensent que ce rituel est aussi l’indication hermétique qu’un cadavre, embaumé comme ceux des Pharaons, est assis sur un fauteuil de pierre, dans une caverne proche de Rennes-le-Château, et attend le signal de la Résurrection des enfants d’Abraam pour se lever.»

 

L’identité de ce corps n’est pas clairement signifiée, sinon par l’allusion aux enfants d’Abraham, qui fait du mort, un Juif. Le signal de la Résurrection est également porteur de sens. Implicitement, il semble identifier ce mort au Christ, dont les croyants attendent le retour sur Terre. Manifestement, ce texte affirme donc que la tombe de Jésus se trouve à proximité de Rennes-le-Château.

 

Cette interprétation est confirmée par la lecture des autres productions du Prieuré de Sion, qui recèlent plus d’une allusion à la présence de la tombe du Christ à proximité, non pas de Rennes-le-Château, mais de Rennes-les-Bains.

 

Ainsi, par exemple, dans Au pays de la Reine blanche, lit-on que la pensée médiévale associait les trois rochers gardant l’entrée de Rennes-les-Bains aux trois rois Mages : Rocko-Negro à Melchior, le noir ; le Roc Pointu à Balthazar, le jaune ; et Blanchefort à Gaspar, le blanc. Les trois rois mages entourant Jésus, implicitement, le texte signifie que les trois rochers entourent également Jésus…

 

Lazare Veni Foras…

 

Certaines «inventions» du Prieuré de Sion ne se comprennent qu’au regard de cette idée ― qui serait la révélation finale à laquelle doivent permettre d’aboutir les différentes publications du Prieuré ― qu’une sépulture enfermant les corps de Marie-Madeleine, Jésus, et d’autres de leurs proches, se trouve à proximité de Rennes-les-Bains.

 

C’est le cas avec Lazare Veni Foras, un ouvrage semble-t-il inventé de toute pièce par les mystificateurs, et attribué à l’abbé Boudet, un confrère de l’abbé Saunière, sur lequel nous aurons à revenir par la suite. Ce prêtre, qui officiait à Rennes-les-Bains du temps de l’abbé Saunière, s’était illustré par la publication d’un ouvrage, La Vraie langue celtique et le cromlech de Rennes-les-Bains. Sans doute est-ce cette activité littéraire qui conduisit naturellement Pierre Plantard à attribuer à l’homme d’église, un autre ouvrage dont aucune trace n’a été conservée en terme de dépôt légal, ou autre recensement bibliographique : Lazare, veni foras !

 

La mention de ce texte apparaît pour la première fois dans Les descendants mérovingiens. «…un nouveau livre publié en 1914 par ce même curé : Lazare, veni foras ! devait signer son expulsion. Son dernier ouvrage fut retiré du public…»

 

Gérard de Sède allait plus tard prétendre avoir en sa possession un enregistrement y faisant allusion. Au cours de cet entretien qu’il aurait eu avec l’abbé Courtauly et qui, faut-il le préciser, est une invention de l’auteur, ou plutôt de ses inspirateurs, l’abbé aurait fait allusion au livre détruit : «C’est toute une affaire Boudet. Il quitta Rennes-les-Bains en mai 1914, il avait eu des ennuis avec l’évêché. On a détruit devant lui ses manuscrits, son livre Lazare qui fut brûlé.» (12)

 

Rien n’est dit ici du contenu de l’ouvrage, mais le fait qu’il soit dit qu’il fut brûlé sur ordre de l’Evêché laisse clairement entendre que le contenu de cette nouvelle publication était hérétique…

 

 

 

 

C’est ce que dit clairement Gérard de Sède dans la préface à la réédition de La Vraie langue celtique parue à la Demeure Philosophale en 1978 : «Nous ne saurons peut-être jamais quelle hérésie pouvait bien contenir ce Lazare, si toutefois il en contenait une, car aucun chercheur n’a encore réussi à s’en procurer un exemplaire.» (13) 

 

S’il feint d’ignorer le contenu supposé de l’ouvrage, Gérard de Sède en a néanmoins, semble-t-il, une certaine idée, du moins si l’on se réfère à ses précédentes productions. Dans la bibliographie de L’Or de Rennes, en effet, Gérard de Sède citait le Lazare, veni foras ! en lui attribuant une date de parution différente de celle donnée par Les descendants mérovingiens : 1891. (14)

 

Ce changement de date n’a sans doute d’autre fonction que d’inciter le lecteur à rapprocher le Lazare, veni foras ! de ce que de Sède dit de l’année 1891 à propos de Saunière. Cette année là est, selon lui, celle où l’abbé Saunière découvrit les documents qui furent si déterminants dans son destin. Il mentionne à ce sujet, en l’entourant de mystère, le collage réalisé par le prêtre que nous avons déjà évoqué. Rappelons qu’il s’agit de deux gravures juxtaposées. La première, représente «trois anges enlevant au ciel un enfant dans un linceul et s’accompagne de cette légende : “L’année 1891 portée dans l’éternité avec le fruit dont on parle ci-dessous”» (15) La seconde, positionnée sous la première, figure l’adoration des Rois Mages…

 

De Sède renvoie ce collage à la découverte d’un trésor monétaire. Il met en parallèle le fait que les documents découverts par l’abbé le rendirent riche avec ces mots reproduits sur la gravure : «Reçois, ô Roi, l’or, symbole de la royauté.»

 

En réalité, conformément à la manière de procéder observée dans les précédents textes, ce motif mis en avant est fait pour détourner l’attention du message implicitement véhiculé. Les mots employés par Gérard de Sède pour décrire la première scène ne sont pas anodins. Alors que les anges portent l’enfant dans un grand tissu, Gérard de Sède emploie le mot «linceul», lequel a une connotation strictement funéraire. Dans le Dictionnaire, sa définition est : «pièce de toile dans laquelle on ensevelit un mort». Quant à la seconde scène, c’est évidemment Jésus qui en est le centre et non l’offrande de l’or… La publication d’une reproduction de la dite gravure dans Signé : Rose + Croix met en lumière la stratégie des auteurs de L’Or de Rennes. Alors qu’ils ne citent dans leur description que la seule offrande de l’or, la gravure a une légende beaucoup plus développée, puisque citant les trois offrandes, et la mise en page du cahier d’illustration est telle que seule soit lisible la seconde offrande, celle de Gaspard : «Reçois la myrrhe, symbole de la sépulture.»

 

Si l’année 1891 fut portée dans l’éternité, c’est donc, selon la lecture à laquelle nous invite Gérard de Sède, par la découverte d’un élément funéraire lié à Jésus… On comprend, au vu de cela, quel contenu hérétique les auteurs de la mystification entendaient donner au Lazare

 

C’est dans ce sens, effectivement, qu’allèrent par la suite les différentes «rumeurs» qui coururent à propos du second ouvrage de l’abbé Boudet. 

 

En 1978, alors que Gérard de Sède écrivait la préface de la nouvelle édition de La Vraie langue celtique mentionnée précédemment, de prétendues copies du Lazare furent mises en circulation par l’entremise d’une petite annonce passée dans le numéro d’octobre de la revue L’Autre Monde.

 

«Part. A Part. vend Document. Ouvrage rarissime. Authentique 1891. Abbé H. Boud et “Lazare, Véni, Foras” Clé R + C. Rennes le Château. Ecrire à la revue qui transmettra.» (16)

 

Sollicité, l’auteur de l’annonce ― un certain Nacim Djama résidant à Toulouse ― devait répondre qu’il s’était déjà dessaisi de l’ouvrage auprès d’un acheteur de Zurich. Il avait cependant pris soin de faire une copie de l’ouvrage en question, et avait pris la décision de diffuser 9 reproductions intégrales du texte, à qui voudrait bien les lui acheter…

 

Sa lettre donnait quelques précisions sur l’ouvrage copié, l’édition de 1914 de l’ouvrage composé en 1891 ― précisions venant expliquer la différence de date relevée entre Les descendants mérovingiens et L’or de Rennes.

 

Lazare, veni foras !  y est présenté comme «une curieuse hagiographie de la famille de Béthanie et de Sainte Madeleine» devant avoir «un contenu initiatique bien plus important que sa rareté de fait.»

 

Un texte de présentation de l’ouvrage accompagnait cette missive. (17) Il y est précisé que le seul exemplaire du Lazare existant encore de manière officielle ne quitte jamais la Réserve de la Bibliothèque de l’Evêché de Carcassonne et que «ce livre est devenu rarissime car la quasi totalité des exemplaires durent être restitués à leur sortie de l’imprimerie aux autorités religieuses de Carcassonne et c’est l’Abbé Henri Boudet qui dut remettre, en personne, le tirage complet et son manuscrit à l’Autodafé.»

 

La suite de ce document précise qu’après avoir été sanctionné, l’abbé Boudet dut quitter Rennes-les-Bains pour Axat, où il ne tarda pas à trouver la mort «sans doute victime d’un empoisonnement criminel.»

 

Il signale, enfin, quel secret est codé dans l’ouvrage ― le même que renfermait déjà La Vraie langue celtique… ― à savoir, la présence, à Rennes-les-Bains, de la tombe de Lazare. «Pas plus que La Vraie langue celtique, ce livre n’apporte, de prime abord, des indications évidentes sur l’emplacement de la tombe de Lazare ou sur un des dépôts précieux de Rennes. Cependant, quelques lieux des environs de Rennes où Lazare vint en cure thermale, et pour d’autres raisons, y sont décrits de manière allusive mais précise dans un style particulier à l’Abbé Henri Boudet.»   

 


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